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les marrons du feu

semaine suivante il la plaçait dans un pensionnat de Milliers-le-Bel, d’où elle ne sortit que son éducation achevée.


✽ ✽

… Il restait là, le pinceau en l’air, songeant à toutes ces choses, déjà lointaines, et à la place immense que cette enfant, recueillie par charité, avait prise dans sa vie…

« Quinze ans !… comme on vieillit ! murmura-t-il.

— Heureusement, bon ami », dit une voix rieuse.

Une gracieuse jeune fille, l’original des deux portraits, lui tendait son front à baiser.

« À ton âge on dit tant mieux ! au mien, tant pis ! mignonne…

— Pourquoi cela, bon ami ? vous n’êtes pas vieux, au contraire.

— Hum ! Enfin ! as-tu aussi bien dormi dans ta petite chambre que dans ton grand dortoir, et le chocolat de ma vieille Ursule vaut-il celui de ta pension ?

— Oh ! oui, bon ami.

— Alors tu ne t’ennuieras pas ici ?

— M’ennuyer avec vous !

— Tu ne regretteras pas tes compagnes ?

— Non, certes. D’abord moi, vous savez, j’ai toujours été un peu sauvage ; petite mère (c’était le titre que l’on donnait à la directrice) me le reprochait assez, j’avais de bonnes camarades, mais pas d’amies. Pourquoi faire ? je n’aurais aimé personne autant que vous !…

— Alors tu ne regrettes rien, bien sûr ?

— Très sûr. J’étais très bien là-bas, ces dames étaient excellentes et me traitaient en enfant gâtée, mais enfin, la pension !…