Page:Doyle - Jim Harrison, Boxeur, trad Savine, 1910.djvu/48

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

Un jour, un peu après l’époque de notre aventure à la Falaise royale, j’étais assis dans le cottage, occupé à examiner les curiosités que mon père avait fixées aux murs, et je souhaitais en paresseux que j’étais que M. Lilly fût mort avant d’écrire sa grammaire latine, quand ma mère, qui était assise à la fenêtre, son tricot à la main, jeta un petit cri de surprise.

— Grands Dieux ! fit-elle, comme cette femme a l’air commun !

Il était si rare d’entendre ma mère exprimer une opinion défavorable sur qui que ce fût (à moins que ce ne fût sur Bonaparte) qu’en un bond je traversai la pièce et fus à la fenêtre.

Une chaise, attelée d’un poney, descendait lentement la rue du village et, dans la chaise, était assise la personne la plus singulièrement faite que j’eusse jamais vue.

Elle était de forte corpulence et avait la figure d’un rouge si foncé que son nez et ses joues prenaient une vraie teinte de pourpre.

Elle était coiffée d’un vaste chapeau avec une plume blanche qui se balançait.

De dessous les bords, deux yeux noirs effrontés regardaient au dehors avec une expression de colère et de défi, comme pour dire aux gens qu’elle faisait moins de cas d’eux qu’ils ne se souciaient d’elle.

Son costume consistait en une sorte de pelisse écarlate, garnie au cou de duvet de cygne. Sa main laissait aller les rênes, pendant que le poney errait d’un bord à l’autre de la route au gré de son caprice.

À chaque oscillation de la chaise correspondait une oscillation du grand chapeau, si bien que nous en apercevions tantôt la coiffe et tantôt le bord.

— Quel terrible spectacle ! s’écria ma mère.