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jim harrison, boxeur

je n’avais senti sur mes lèvres le goût du sel sans éprouver en moi le frisson que donnaient à mon sang cinq générations de marins.

Et puis songez aux provocations qui ne cessaient de s’agiter en ces temps-là devant les yeux d’un jeune garçon habitant sur la côte.

Au temps de la guerre, je n’avais qu’à aller jusqu’à Wolstonbury pour apercevoir les voiles des chasse-marées et des corsaires français.

Plus d’une fois, j’avais entendu le grondement des canons arrivant de fort loin jusqu’à moi.

Puis, c’étaient des gens de mer nous racontant comment ils avaient quitté Londres et s’étaient battus avant la tombée de la nuit, ou bien, à peine sortis de Portsmouth, s’étaient trouvés bord à bord avec l’ennemi, avant même d’avoir perdu de vue le phare de Sainte-Hélène.

C’était l’imminence du danger qui nous réchauffait le cœur en faveur de nos marins, qui inspirait nos propos, autour des feux de l’hiver, où nous parlions de notre petit Nelson, de Cuddie Collingwood, de Johnnie Jarvis, de bien d’autres.

Pour nous, ce n’étaient point de grands amiraux, avec des titres, des dignités, mais de bons amis à qui nous donnions de préférence notre affection et notre estime.

Auriez-vous parcouru la Grande-Bretagne de long en large que vous n’y auriez pas trouvé un seul jeune garçon qui ne brûlât du désir de partir avec eux sous le pavillon à croix rouge.

Mais, maintenant la paix était venue, et les flottes, qui avaient balayé le canal de la Méditerranée, étaient immobiles et désarmées dans nos ports.

Il y avait moins d’occasions pour attirer nos imaginations du côté de la mer.