Page:Doyle - Jim Harrison, Boxeur, trad Savine, 1910.djvu/91

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
80
jim harrison, boxeur

Mon oncle hocha ta tête.

— Bien des fois, je me suis fait cette question et ce soir elle se présente plus nettement que jamais à mon esprit.

Toute légèreté avait disparu de ses manières et il était devenu soudain un homme mélancolique et sérieux.

— Est-il certain qu’il l’a commis, Charles ? demanda ma mère.

Mon oncle haussa les épaules.

— Je voudrais parfois penser qu’il n’en fût pas ainsi. Je crus parfois que ce fut son orgueil même, exaspéré jusqu’à la rage, qui l’y poussa. Vous avez entendu raconter comment il renvoya la somme que nous avions perdue.

— Non, répondit mon père, je n’en ai jamais entendu parler.

— Maintenant, c’est une bien vieille histoire, quoique nous n’ayons jamais su comment elle se termina.

Nous avions joué tous les quatre, pendant deux jours, Lord Avon, son frère, le capitaine Barrington, Sir Lothian Hume et moi.

Je savais peu de choses du capitaine, sinon qu’il ne jouissait pas de la meilleure réputation et qu’il était presque entièrement aux mains des prêteurs juifs.

Sir Lothian s’est acquis depuis un renom déshonorant, — c’est même Sir Lothian qui a tué Lord Carton d’une balle, dans l’affaire de Chalk Farm — mais à cette époque-là, il n’y avait rien à lui reprocher.

Le plus âgé de nous n’avait que vingt-quatre ans, et nous jouâmes sans interruption, comme je l’ai dit, jusqu’à ce que le capitaine eut gagné tout l’argent sur table. Nous étions tous entamés, mais notre hôte l’était encore beaucoup plus que nous.