Page:Doyle - Les Réfugiés.djvu/122

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l’écart, et confié les affaires de mon royaume à des hommes dont les noms sont inconnus dans l’histoire de la France, à des hommes comme Colbert et vous ? On me l’a reproché. Le duc de Saint-Simon disait la dernière fois qu’il vint à la cour que c’était un gouvernement de bourgeois. C’est vrai, mais je l’ai voulu ainsi parce que je savais bien que les nobles veulent penser par eux-mêmes, et je n’ai pas besoin d’autres pensées que les miennes dans le gouvernement de la France. Mais s’il faut que mes bourgeois reçoivent des messages et qu’ils y répondent, alors je suis vraiment à plaindre. Je vous observe depuis quelque temps, Louvois, vous avez pris une trop haute opinion de votre importance. Vous voulez trop faire par vous-même. Veillez-y et que je n’aie plus à vous faire d’observations à ce sujet.

Le ministre humilié subissait ces rebuffades sans faire un mouvement, la tête basse, le menton enfoncé dans sa poitrine. Le roi continua encore quelques instants, les sourcils froncés ; mais le nuage disparut peu à peu de son front, car ses accès de colère étaient habituellement aussi courts qu’ils étaient violents et soudains.

— Vous ne laisserez pas partir ce courrier, dit-il enfin d’une voix calme.

— Non, Sire.

— Et nous verrons en réunion du Conseil quelle réponse nous devrons faire à lord Sunderland. Il serait peut-être préférable de ne pas trop s’avancer dans cette affaire. Ces Anglais ont toujours