Page:Doyle - Les Réfugiés.djvu/3

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moustache noire effilée et de grands yeux bruns que l’on sentait capables avec un égal succès de se durcir pour le commandement ou de se faire tendres pour des supplications d’amour. Il était vêtu d’un habit bleu de ciel orné de broderies sous lequel paraissait un gilet de calmande blanche ; ses culottes, de même étoffe, disparaissaient presque entièrement dans de vastes bottes évasées, garnies d’éperons dorés. Une rapière à garde d’argent et un chapeau garni d’une plume blanche, posés sur un escabeau à côté de lui, complétaient un costume qui était un signe d’honneur pour celui qui le portait, car n’importe quel Français l’eût reconnu pour l’uniforme des officiers des célèbres mousquetaires bleus de Louis XIV. Il avait vraiment un air brave et résolu, ce soldat, avec ses cheveux noirs frisés, sa tête bien posée sur les épaules larges et carrées. Et tel il s’était montré sur les champs de bataille, car le nom d’Amaury de Catinat était aujourd’hui fameux parmi les milliers de jeunes nobles qui se pressaient au service du roi.

Ils étaient cousins germains, et il y avait juste assez de ressemblance dans leurs traits fins et réguliers pour déceler cette parenté. Catinat était issu d’une noble famille huguenote, mais ayant perdu ses parents de bonne heure, il avait pris la carrière des armes et s’était frayé un chemin dans l’armée par son seul mérite. Le frère cadet de son père, se voyant toute route vers la fortune barrée par les persécutions auxquelles étaient