Page:Doyle - Les Réfugiés.djvu/4

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déjà en butte les gens de sa religion, avait supprimé le de qui indiquait son origine noble et s’était établi marchand à Paris avec un succès tel qu’il devint rapidement un des hommes les plus riches et les plus notables de la ville. C’est sous son toit que se trouvait en ce moment le mousquetaire entourant de son bras la taille souple de sa cousine : les deux jeunes gens étaient fiancés, et le vieux Catinat caressait l’espoir de voir se continuer par eux son nom et sa race.

— Qu’avez-vous donc, Adèle ? dit tout à coup le soldat, vous me semblez avoir quelque peine.

— Non, Amaury, je n’ai pas de peine.

— Je vois pourtant une petite ligne, là, entre ces deux sourcils. Ah ! je lis en vous comme un berger sait lire dans le ciel.

— Ce n’est rien, Amaury, seulement…

— Seulement quoi ?

— Vous me quittez ce soir.

— Oui, mais pour revenir demain.

— Est-il absolument nécessaire que vous partiez ?

— Autant dire que ce serait pour moi la perte de ma commission d’officier si je n’étais pas à Versailles ce soir. Je suis de service toute la nuit à la porte de la chambre du roi ; après la messe, M. de Brissac prendra ma place et je serai libre de nouveau.

— Ah ! Amaury, quand je vous entends parler du roi, de la cour et des grandes dames, je ne puis m’empêcher d’être étonnée.