Page:Doyle - Les Réfugiés.djvu/332

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Le capitaine Sharkey, commandant du navire des pirates de vingt canons l’Heureuse-Délivrance avait croisé dans les parages, et la côte avait recueilli des débris de vaisseaux et des cadavres de marins. De terribles anecdotes couraient sur ses sinistres plaisanteries et son inflexible férocité. Des Bahamas au Main, sa coque noire comme le charbon, avec son nom à double sens, semblait avoir été affrétée par la mort, et par les supplices pires que la mort elle-même.

Le capitaine Scanow affectionnait par-dessus tout son fin voilier et tenait aussi à sa cargaison représentant une grande valeur ; il cingla donc directement vers l’ouest jusqu’à l’île Bird, évitant ainsi de suivre la route ordinaire des bateaux de commerce. Et, pourtant, dans ces eaux solitaires, il avait encore trouvé des traces du passage du terrible pirate.

Un matin, la vigie avait signalé un petit canot isolé dans l’immensité de l’océan ; quand il fut accosté, on constata qu’il contenait seulement un matelot en délire, qui se mit à hurler d’une voix rauque quand on le hissa à bord. Il montrait une langue desséchée, ressemblant à un champignon noir au fond de sa bouche. On lui donna à boire,