Page:Doyle - Les Réfugiés.djvu/53

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— Comment ?

— En révoquant l’édit.

— Et en jetant dans les bras de mes ennemis deux millions de mes meilleurs artisans et de mes plus braves serviteurs. Non, non, mon père, je montre, je crois, le plus grand zèle pour notre sainte mère l’Église, mais il y a quelque vérité dans ce que disait Frontenac ce matin du mal qui résulte du mélange des affaires de cette vie avec celles de l’autre vie. Qu’en dites-vous, Louvois ?

— Avec tout le respect que je dois à l’Église, Sire, je dirais volontiers que le diable a doué ces hommes d’une telle habileté de main pour les travaux manuels et d’une telle intelligence du commerce et de l’industrie, qu’ils sont les meilleurs ouvriers et les meilleurs commerçants du royaume de Votre Majesté. Je ne sais pas comment on remplira les coffres de l’État, si les taxes qu’ils payent nous font défaut. Déjà beaucoup ont quitté le pays, et ils ont emporté avec eux leurs industries. S’ils devaient disparaître tous ce serait pis pour nous qu’une campagne perdue.

— Mais, fit remarquer Bossuet, si l’on savait que le roi a exprimé sa volonté, Votre Majesté peut être assurée que les moindres de ses sujets lui portent une si profonde affection, qu’ils se hâteraient d’obéir. Tant que l’édit subsiste, il leur semble que le roi est tiède, et qu’ils peuvent demeurer dans leur erreur.

Le roi secoua la tête.