Page:Doyle - Les Réfugiés.djvu/56

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Meaux resta seul, le menton dans la main et plongé dans ses réflexions.

Cependant toute la cour s’était assemblée dans le Grand Salon, et c’était dans l’immense pièce une allée et venue de seigneurs et de grandes dames avec des chatoiements de soie, de velours et de brocart, des scintillements de bijoux, des mouvements d’éventails, des ondulations de panaches et d’aigrettes. Les costumes gris, bruns et noirs des hommes atténuaient l’éclat des toilettes féminines, fondant les nuances, car tout devait être sombre quand le roi était sombre, et seuls le bleu et le gris perle des mousquetaires de la garde rappelaient les premières années du règne où les hommes rivalisaient avec les femmes pour le luxe de leurs vêtements. Mais si les costumes s’étaient modifiés, les manières avaient subi un changement plus grand encore. La frivolité et les vieilles passions de jadis demeuraient sans doute bien près de la surface, mais la mode du jour était aux visages graves et aux conversations sérieuses. Ce n’était plus le coup heureux à la table de lansquenet, la dernière comédie de Molière ou le nouvel opéra de Lulli dont on causait : des discussions sur le Jansénisme, l’expulsion d’Arnaud de la Sorbonne, l’insolence de Pascal, les mérites comparatifs des deux prédicateurs populaires Bourdaloue et Massillon, tels étaient les sujets qui formaient le fond de toutes les causeries. Tous ces nobles seigneurs et toutes ces grandes dames allaient et venaient, copiant leurs