Page:Doyle - Les Réfugiés.djvu/60

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pouvaient se résoudre à quitter le pays qui refusait de les reconnaître, et pleins de cet amour pour le sol natal si profondément enraciné dans le cœur de tout Français, ils préféraient subir l’insulte et les outrages dans leur pays plutôt que d’aller chercher un accueil chaleureux au delà des mers. Déjà, pourtant, on sentait poindre l’aube de ces jours où le choix ne leur appartiendrait plus.

Deux énormes gardes du roi en uniforme bleu qui étaient de service aux portes du palais avaient été témoins de la déconvenue du vieillard. Quand le cortège fut passé ils s’avancèrent de leur pas lourd jusqu’à l’endroit où il se tenait et interrompirent brutalement le cours de ses pensées.

— Allons, le marchand de psaumes, dit l’un d’un ton rogue, il faut déguerpir.

— Vous n’êtes pas un bien bel ornement sur le passage du roi, dit l’autre. Qui donc êtes-vous pour dédaigner la religion du roi, mauvais chien ?

Le vieux huguenot leur jeta un regard de colère et de dédain, et il se disposait à s’en aller quand l’un d’eux lui enfonça dans les côtes le bout de sa hallebarde en criant :

— Prends cela, canaille ! Ah ! tu oses regarder ainsi un garde du roi !

— Enfants de Bélial ! cria le vieillard en portant la main à son côté, si j’avais seulement vingt ans de moins vous n’auriez pas osé me traiter de cette façon.

— Ah ! tu veux continuer à cracher ton venin.