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Page:Doyle - Les Réfugiés.djvu/83

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— Non, non, mon enfant, aucun de nous n’a eu de mal grâce à Son Altesse le prince de Condé, que voici.

Adèle leva les yeux et les abaissa de nouveau devant le regard interrogateur et étonné du vieux soldat. Le sang afflua à ses joues, et la fit paraître plus belle encore, avec l’ovale délicat de son visage, ses grands yeux gris et l’ondulation de ses cheveux lustrés dont les chaudes teintes faisaient ressortir la nacre de ses petites oreilles comme deux coquilles, et l’albâtre de son cou et de sa gorge. Condé lui-même, qui avait connu toutes les beautés de trois cours successives pendant soixante ans, resta en extase devant la fille du huguenot.

— Eh ! ma parole ! mademoiselle, vous me faites regretter de ne pouvoir effacer quarante ans de ma vie.

Il s’inclina avec un soupir, ce soupir qui était en vogue quand Buckingham vint aux fiançailles d’Anne d’Autriche et que la dynastie des cardinaux était dans tout son éclat.

— La France se serait difficilement passée de ces quarante ans, Altesse.

— Eh ! eh ! prompte à la riposte aussi ! Votre fille a un esprit qui aurait du succès à la cour, monsieur.

— Dieu nous en préserve, Altesse ! Elle est aussi pure qu’elle est bonne.

— Pardieu, voilà qui n’est guère flatteur pour la cour ! Mais vous devez vous ennuyer, made-