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LETTRES D’UN INNOCENT

ranime, ta pensée, celle des enfants, mon devoir enfin.

Les lignes où tu me parles des chers enfants m’ont fait aussi bien plaisir ; elles me permettent de me les représenter par la pensée.

Embrasse bien fort ces chéris pour moi.

Donc, ma chère et bonne Lucie, toujours courage, toujours la tête haute, jusqu’à ce que nous puissions, l’un près de l’autre, oublier cet horrible drame. Souhaitons pour tous que ce moment vienne bientôt !

Je t’embrasse comme je t’aime.

Ton dévoué,

Alfred.

Baisers à tous.

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Le 26 janvier 1896.

Tu me demandes, ma chère et bonne Lucie, de t’écrire longuement. Que puis-je te dire encore que tu ne sentes en ton cœur mieux que je ne saurai te le dire ? Mon cœur est toujours avec toi, déchiré de te sentir souffrir d’une manière aussi imméritée et de ne rien pouvoir faire pour toi que d’endurer des souffrances égales ; mon âme, nuit et jour, est auprès de toi, pour te soutenir et t’animer de son ardente volonté. D’ailleurs, je ne puis que me le répéter toujours : le but est tout ; l’honneur de notre nom, de nos enfants ; et il faut l’atteindre, envers et contre tous. Mais la situation est si atroce, aussi bien pour toi que pour moi, que les activités qui doivent être de tous les genres, comme de toutes les heures, loin de faiblir, doivent au contraire grandir encore et