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tement porté : une jupe à plis droits, couleur vert bouteille, un spencer en drap rouge vif, garni de peau d’agneau et orné de quatre brandebourgs verts, tel était ce costume.

La cantinière était nu-tête et ses cheveux noirs, séparés au milieu du front, encadraient son visage.

— Viens, mon enfant, dit-elle, en prenant doucement la main du petit soldat ; et le faisant asseoir à côté d’elle et de sa fille, elle se mit à le questionner.

Jean répondit gentiment, sans embarras, et raconta son histoire.

Il lui semblait qu’il aimait déjà la cantinière ; qu’il l’avait toujours connue ; et son entrée dans la vie militaire lui parut dès lors très naturelle.

La rudesse de La Ramée l’avait tout d’abord surpris ; mais cet accueil si bienveillant d’une femme le rassura par sa douceur.

Lorsqu’il eut terminé son récit et répondu à toutes les questions :

« Allons ! ça va bien, mon petit Jean, dit la « citoyenne Catherine » ; tu vas faire un joli tambour ; et puisque tu n’as plus de maman, c’est moi qui t’en servirai.

— Oh ! merci », dit l’enfant.

Avec la blonde Lisette, la fille de dame Catherine, la connaissance fut vite faite : une fillette de dix ans et un garçonnet de douze ne sont pas longs à s’entendre.

Lisette, Lise ou Lison (on donnait indifféremment un de ces trois noms à la petite Louise) avait du reste déclaré de suite que « Jean avait l’air bien gentil ».

Tous deux, après un échange de questions, se mirent à feuilleter « l’Almanach du Bon Citoyen », cet almanach dans lequel la fillette s’essayait à lire lorsque Jean était arrivé. Comme Jean Cardignac lisait couramment les légendes des images, Lisette fut de suite remplie d’admiration.

« Oh ! comme tu lis bien ! dit-elle.

— C’est papa qui m’a appris.

— Moi, je ne sais pas encore bien, mais maman me fait lire tous les jours… Tu m’apprendras, dis ?

— Je veux bien… ça n’est pas difficile. Tiens, tu vois ce portrait ; il y a dessous : « Ceci est l’image ressemblante du général La Fayette ». Tu vas lire, en suivant les lettres.