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CHAPITRE VII

officiers d’ordonnance


— Ah ! par exemple !… Ça, c’est un peu violent d’arriver ainsi sans crier gare !

Cette exclamation, faite sur un ton demi-plaisant, mais dont une émotion profonde faisait trembler les mots, jaillit des lèvres du colonel Cardignac lorsqu’il vit arriver son Henri qui, d’un élan, se précipita dans ses bras.

Le lieutenant de spahis avait en effet intentionnellement négligé de prévenir sa famille, lui ménageant ainsi la surprise de son arrivée… et de sa croix.

Il pleurait, le vieux soldat de Napoléon, en serrant contre sa rude poitrine ce fils dont il était si fier, dont la croix noblement gagnée l’emplissait d’un juste orgueil.

Ah ! que ce sont là de bonnes larmes, de saines émotions ! Comme ils se sentaient grandis, ces deux hommes, l’un, parce qu’il apportait aux siens de la joie pour avoir bien accompli son devoir ; l’autre, parce qu’il se retrouvait lui-même dans la gloire de son fils, élevé par lui pour l’armée, pour l’honneur !

Et Lise, la douce maman aux cheveux blancs, ah ! qu’elle était aussi bien heureuse et bien fière ! Heureuse surtout, en constatant que ni la fièvre, ni les balles, ni le yatagan des Arabes n’avaient même effleuré son enfant ; qu’il avait passé au milieu des dangers, les affrontant avec témérité pendant des années, sans que la fatalité se fût abattue sur lui.