appendice, nécessaire il est vrai pour préserver le plastron du vêtement de drap, mais rendu plus affreux encore par les taches de toutes couleurs dont les anciens surtout s’acharnent à le zébrer.
Pendant toute cette scène, le petit Andrit était resté là, médusé.
Et quand ils se retrouvèrent tous deux dans la cour Wagram :
— Tu as la médaille militaire ! fit-il, avec une expression admirative qui fit sourire notre ami.
— Mais, oui ; comme tu vois.
— Et tu ne me le disais pas ?
— Mais je n’ai pas encore eu le temps ; tu m’as raconté ton histoire ; je vais te raconter la mienne.
— Alors, tu as fais la campagne de 1870 !
— Mais oui ; seulement, moi, j’avais deux ans de plus que toi.
— Va, si j’avais eu seize ans, comme toi, je ne serais pas parti davantage : mes parents ne m’auraient pas laissé faire.
— Ah, voilà ! dans ce cas-là, il ne faut pas demander conseil à ses parents : on est trop sûr de leur réponse !
— Alors, toi, tu es parti malgré eux ?
— Non ; pas malgré mon père, puisque j’allais le rejoindre à Metz, où je suis arrivé trop tard pour le revoir ; mais malgré ma mère, oui…
— Et tu t’es battu ? tu as tiré des coups de fusil ? tu as entendu siffler des balles ? Georges sourit :
— J’en ai même reçu deux, fit-il, sans quoi je n’aurais pas eu la chance d’être médaillé : des blessures heureuses, tu vois, et dont je ne me ressens pas…
Et il fallut que, ce même jour, Georges Cardignac racontât en grands détails à son nouvel ami la bataille de Bazeilles, sa fuite de Sedan et toutes les péripéties de la lutte en province à laquelle il avait pris part.
Le petit Andrit n’en revenait pas, et son regard reflétait une admiration sans bornes en écoutant ce récit fait simplement.
— Oh ! fit-il quand il fut terminé, si j’avais su !…
— Qu’aurais-tu fait ?
— Je serais parti aussi, fit-il, en serrant les poings. Qui sait ? j’aurais peut-être été blessé aussi. Mais non, il faut appartenir à une famille militaire,