Page:Driant, Histoire d’une famille de soldats 3, 1904.djvu/422

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s’ouvrant sur Lang-Son, pour dépasser la place et se refermer derrière elle.

Pendant toute la journée la brigade avait tenu tête et vaillamment : des milliers de Chinois avaient été balayés par la mitraille, et la journée s’annonçait comme une brillante revanche de celle du 24, lorsque, à trois heures de l’après-midi, le général de Négrier, s’étant exposé suivant son habitude, avait reçu une balle à la poitrine.

La blessure n’était pas grave heureusement : la balle s’était amortie contre un carnet qu’elle avait traversé ; mais le général, transporté à l’ambulance, n’en devait pas moins abandonner le commandement, et comme, seul, à cette heure difficile, il soutenait le moral de tous, que la fatigue était extrême et les Chinois de plus en plus nombreux, l’ordre était venu de battre en retraite.

Lang-Son évacué, la brigade avait reculé successivement sur Than-Moï et Dong-Son, puis sur Chu et sur Kep.

Ce fut là que le général Brière de l’Isle et le général Giovaninelli la rejoignirent, précédant, sur la canonnière le Moulun, les renforts qui arrivaient à marche forcée.

Paul Cousturier avait suivi bravement le bataillon de marsouins dont faisait partie Georges Cardignac. Les officiers l’avaient bien regardé de travers le premier jour, se demandant s’ils n’avaient pas affaire à un nouveau Kohvitz, dont l’histoire était maintenant connue de tous ; mais Georges l’avait présenté à ses camarades et à ses chefs le soir même, à l’arrivée au bivouac, et la belle humeur, l’inaltérable confiance et le talent de l’artiste lui avaient acquis aussitôt droit de cité au bataillon. Non seulement il n’avait pas eu à s’occuper de cuisine, mais il avait été tout de suite invité à la popote de la compagnie Bauche, qui était celle de Georges, et il s’apprêtait à prendre des croquis de batailles, ce qui n’était pas ordinaire, lorsqu’une nouvelle aussi inattendue que celle de la retraite de Lang-Son parvint au quartier général.

La paix venait d’être conclue avec la Chine.

Ce traité de Tien-Tsin, qu’elle avait violé en attaquant traîtreusement nos troupes à Bac-Lé, et sur lequel elle ergotait depuis dix mois avec toute l’astuce dont Li-Hung-Chang était capable, elle l’acceptait à présent.

Mais personne au camp n’ajouta foi à cette nouvelle, transmise officiellement cependant de Paris.