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Page:Driant-Un dirigeable au pôle Nord,1910.djvu/110

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arrêter la machine, car il songe aux hélices dont l’une peut toucher le sol et éclater en mille morceaux.

Puis il réfléchit qu’en laissant courir l’aérostat il atténuera la violence du choc de toute la rapidité de translation. Le ballon glissera, le danger le plus grand sera dans les éclats d’acier de l’hélice.

Maintenant, il voudrait obliger Christiane à se baisser au fond de la nacelle. Tout à l’heure, il eût voulu qu’elle se suspendit à l’un des trapèzes.

Ces idées contradictoires n’ôtent rien à la lucidité de son cerveau. Les yeux sur le baromètre, il serre nerveusement le volant, satisfait de retrouver l’usage de ses doigts. Car le terrible froid lui avait forgé des gants d’acier semblables à ceux des anciens chevaliers, avec les articulations en moins.

Que faire encore pour enrayer cette descente ?

Si l’on pouvait lancer à temps le guide-rope… Il est remonté, roulé contre le bordage, et il suffit de couper la petite ficelle qui le retient pour qu’il se déroule, touche le sol avant la nacelle et la déleste des 50 kilos que représente son extrémité épaissie à dessein, le serpent, comme l’appelle les aéronautes.

L’Américain a compris. Lui aussi a recouvré en partie l’usage de ses mains, mais c’est en vain qu’il essaie de briser cette petite ficelle ou de défaire avec ses doigts gourds le nœud qui retient le lourd cordage…

Que de fois le salut d’un être humain a dépendu d’un détail infime comme celui-là !