Page:Driant-Un dirigeable au pôle Nord,1910.djvu/27

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mon âme. Puis, j’ai rêvé d’être l’inspiratrice d’un acte héroïque, et voilà que l’acte se précise, voilà que l’homme ayant en mains les moyens de l’accomplir est là… Et j’éprouve une émotion indéfinissable en lui disant : « Pourquoi ne voulez-vous pas être l’élu ? »

Sa jeune poitrine battait avec force.

Il se rapproche, les yeux troubles, lui prit la main qu’elle abandonnait.

— Mademoiselle Christiane, fit-il, très bas, comment me permettez-vous de comprendre ce mot ?…

— Ne le définissons pas maintenant, dit-elle, mais laissez-vous convaincre : tant de raisons devraient vous décider ! Que sera notre retour au milieu des sourires et des sous-entendus des uns, des reproches et des critiques des autres ? Encore, vous n’en souffrirez guère, vous : on est indulgent pour l’homme. Mais moi ?… On n’a le droit de partir comme nous l’avons fait que si on n’en revient pas… ou, si on en revient, avec une étoile au front. Cette étoile, il faut l’aller chercher là-bas.

Et pour la seconde fois, d’un geste impérieux, que tempérait un sourire plein de promesses, elle remit son doigt sur le mot North Pole.

Alors il ne résista plus.

— J’irai, fit-il simplement.

— C’est bien, dit-elle, d’une voix pénétrée ; mais ne dites pas « j’irai », dites : « nous irons ». Car Dieu nous a fait une destinée commune, je ne vous quitte pas. Vous avez renoncé aux objections que