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Page:Driant-Un dirigeable au pôle Nord,1910.djvu/40

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invoquées au début, lui apparaissaient tellement misérables, en face de la grandeur du but, qu’il ne pouvait s’imaginer avoir été arrêté par elles.

Il devait y en avoir une autre.

Et en s’analysant, dans les quelques rares moments de repos que lui laissaient les multiples opérations de l’appareillage, il la trouva.

Cette raison, c’était la peur : il dut se l’avouer à lui-même.

Le Pôle exerçait sur les âmes, il est vrai, une fascination étrange, mais en même temps, il était le dernier mystère de l’exploration terrestre, et ce mystère était plein d’épouvante, parce qu’à sa pénétration trop de victimes volontaires avaient déjà succombé.

Or, parmi elles, il était un aéronaute, un homme, qui n’avait pas craint de se confier avec un ballon sphérique au courant éphémère qui passait, venant du sud, un étranger encore, le Suédois Andrée.

Oui, c’était le souvenir d’Andrée qui avait mis un frisson dans les veines du jeune homme, quand on lui avait proposé de se lancer dans l’inconnu de la mer Polaire, et cette grande ombre devait planer de même sur toutes les tentatives de même nature, puisque ceux qui avaient fait le geste après lui n’avaient osé le faire jusqu’au bout.

Il y avait douze ans de cela.

Un jour de juillet 1897, on avait appris que le Suédois Andrée s’était enlevé de l’île aux Danois, avec ses deux compatriotes Frankel et Strindberg, vingt--