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Page:Driant-Un dirigeable au pôle Nord,1910.djvu/74

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Un peu plus loin, vers le nord, une ligne blanche continue barrait l’horizon.

En quelques minutes, le Patrie l’eut atteinte.

Tout au bord, c’était une sorte de tapis glauque et mouvant. Ici et là, il se crevassait, laissant passer d’immenses vagues lourdes et opaques ; puis, les solutions de continuité disparurent ; des blocs de glace colossaux, semblables à des bornes posées sur la route du Pôle, émaillèrent, de leurs ombres portées très longues, la blancheur des champs de névé, et la banquise polaire se déroula, immense, désolée, immaculée…

— 82° 43’ 17" ! avait proclamé le savant.

— Je serais bien surpris si nous trouvions la mer libre au Pôle, fit l’officier.

Et quand, après une heure de muette contemplation, Georges Durtal se glissa de nouveau dans son sac de peaux, une sorte de quiétude avait remplacé le qui-vive sur lequel il vivait instinctivement depuis le départ. Si une chute se produisait, si le ballon descendait sans excès de vitesse, au moins ne risquait-on plus le plongeon dans l’eau glacée…

Pour le marin, la mer libre au Pôle eût été le rêve.

Pour l’aéronaute, la banquise valait mieux.

Il était près de cinq heures du matin, lorsque sir James Elliot réveilla l’officier.