Page:Driant - L’invasion noire 1-Mobilisation africaine,1913.djvu/139

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

depuis peu dans leur pays, et comme un mot d’ordre, l’idée de « l’Invasion noire » avait pénétré partout.

Quand parurent les signaux, douze groupes se formèrent : sept sur les bords du fleuve qu’ils devaient descendre pour gagner le lac Albert-Nyanza par l’Arrouimi et cinq sur les affluents de gauche du fleuve, ayant pour lieu de rendez-vous le bord occidental du Tanganika.

Un dernier groupe, indépendant de Nzigué et formé des contingents de la rive droite du fleuve, devait gagner le Nil Blanc à hauteur de Wadelaï.

Il comprenait plus de 100.000 combattants, presque tous armés de fusils, et était commandé par Makoua, chef de la tribu des Koshis, qui gardait dans la vieillesse une vigueur extraordinaire et se vantait d’avoir, pendant sa vie, tué plus de mille infidèles.

On l’avait surnommé le « Sanglant ».

Lorsque l’armée congolaise serait concentrée de Wadelaï à Msila, elle n’aurait plus qu’à se mettre en route vers le Nord par la vallée du Nil.

Ce qui distinguait cette armée, c’était sa discipline relative et son organisation : les chefs nommés par Nzigué et choisis parmi les rois les plus intelligents des principales peuplades, avaient reçu le titre « d’émirs ».

Quelques-uns d’entre eux commandaient à plus de 80.000 guerriers et ils disposaient de tous les pouvoirs : religieux, judiciaire et militaire.

Ces corps, qui formaient à eux seuls de véritables armées, étaient subdivisés en fractions correspondant aux brigades, aux régiments et aux bataillons d’Europe.

L’administration et le ravitaillement en étaient évidemment rudimentaires, mais ils avaient sur les troupes civilisées l’avantage de ne traîner derrière elles ni train de combat, ni ambulances, ni train régimentaire, ni convois d’aucune sorte.

Alors qu’un corps d’armée français ou allemand est suivi de plus de mille voitures, les groupements nègres n’avaient d’autres impédimenta que les milliers de femmes qui les suivaient, portant les provisions accumulées depuis de longs mois et préparant chaque soir la nourriture des guerriers.

Cependant trois d’entre eux avaient des éléphants : on en