Page:Driant - L’invasion noire 1-Mobilisation africaine,1913.djvu/276

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homogènes sur le sol ; c’étaient probablement des nègres à pied.

D’autres étaient grises piquées de nombreux points blancs et devaient être composées de cavaliers vêtus de burnous de laine.

D’en haut, tout cela avait l’apparence d’un rassemblement de fourmilière.

Et Regnard répéta pour la dixième fois :

— Ah ! bon Dieu de bon Dieu !

Cependant, Guy se disait que les deux Touaregs leur avaient été bien inutiles dans cette reconnaissance.

« Le noyau ? » leur avait demandé le général.

Or, ils n’auraient eu qu’à montrer la moitié de l’horizon, pour en indiquer l’emplacement.

Mais comment les aéronautes n’avaient-ils pas vu plus tôt de pareilles masses ? Comment n’avaient-ils pas eu tout à l’heure, dans le champ de leurs lorgnettes, cette effrayante réunion d’êtres humains ?

En se rapprochant, l’ingénieur en comprit la raison.

Le désert se creusait, en effet, curieusement en cet endroit.

Un lit de fleuve large de 3 kilomètres et profond de 50 mètres, s’allongeait du Nord-Est au Sud-Est, sur un fond d’argile rougeâtre.

C’était dans cette dépression saharienne que, fidèles aux rendez-vous donnés par Ben-Amema, venaient s’entasser, depuis plusieurs jours, les peuplades en marche : habitants du Figuig, du Tafilelt et du Touat ; Maures d’lguidi, du Zemmour et de l’Adrar ; Nègres de l’Asben, de l’Azaouad et du Tasili ; Touaregs des Ahaggar et de l’Adghagh, envoyés par Ichriden, pour former la cavalerie de cette armée, et tant d’autres que ne connaissent ni les voyageurs ni les géographes.

Les passagers ne parlaient plus ; ils étaient : comme hypnotisés.

— Mais tenez, tenez mon oncle, là surtout ! s’écria Guy.

Le ballon s’approchait des berges de l’Oued.

A leurs pieds ce n’étaient plus des groupements séparés, des tribus assemblées autour de leurs chefs et isolées les unes