Page:Driant - L’invasion noire 1-Mobilisation africaine,1913.djvu/42

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— Ce n’est pas tout, reprit l’envoyé, mon auguste maître a pensé que pour mener à bien une pareille œuvre, il fallait mettre provisoirement un terme aux querelles sanglantes qui éclatent trop souvent entre les disciples de Brahma et ceux de Mahomet, querelles que les Anglais étouffent dans le sang et qu’eux-mêmes provoquent pour régner plus sûrement sur les deux races rivales.

— Il a pensé en sage.

— Il a donc noué des relations avec les principaux rajahs ; il a déjà amené à ses idées ceux de Tanjore, de Madoura et de Nag-pur ; quand l’heure de l’action aura sonné, il aura atteint son but, et les Hindous se joindront aux musulmans pour jeter les Anglais à la mer.

— Ce jour-là sera un jour béni.

— Si, comme il l’espère, l’entente est complète, nos alliés seront assez forts à eux seuls pour anéantir cette race maudite, et mon maître, à la tête des forces qu’il aura pu réunir, pourra, par le Beloutchistan et la Perse, te rejoindre en Asie Mineure. Quel rendez-vous lui donnes-tu ?

— Dis-lui que je l’attendrai à Constantinople.

Longtemps encore le sultan conversa avec les deux messagers. Il leur demanda s’ils avaient eu des nouvelles de leurs frères de Chine.

A ceux-là aussi il avait envoyé des émissaires, car ils étaient plus de trente millions dans ce vaste empire et chaque jour le Coran y gagnait du terrain.

On pouvait même prévoir l’époque où la Chine entière deviendrait musulmane.

— Ah ! l’on a parlé de notre décadence, dit le vieillard en s’animant ; on a dit que nous étions une race abâtardie, finie, usée ; nous allons prouver au monde que l’ère des conquêtes n’est pas close pour nous !

En décadence, la religion du prophète ! poursuivit-il, mais si le christianisme nous a repris l’Espagne, la Sicile et une partie de la France et de l’Italie que nous occupions au second siècle de l’Hégire, nous avons en revanche conquis une partie de l’inde et de la Chine, le Turkestan et les pays à l’est du Volga ; sans Pierre le Grand nous tiendrions toute la Russie : nos ancêtres n’avaient converti que les régions