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la protection des Touaregs rassemblés autour du Ksour, il avait appelé des quatre coins du monde musulman, tous les Arabes qu’il avait jugés capables de comprendre son nouveau rôle et de suivre sa fortune.

Imans de la Mecque, marabouts algériens et marocains, ulémas de Bagdad et de Damas formaient là un conseil dont il était l’inspirateur et le maître.

Il allait combiner avec eux l’action diplomatique avant de commencer l’action militaire.

Il avait six mois encore devant lui : c’était plus qu’il ne fallait pour permettre à la puissance de l’or d’accomplir son travail souterrain.

Maintenant qu’il jetait un long regard sur l’avenir, il ne regrettait plus le passé.

Allah avait eu ses desseins en le précipitant du pouvoir.

S’il eût continué à régner sur cette infime partie de l’ancien empire musulman, il eût dépensé en pure perte et sans moyens suffisants une activité qui promettait à cette heure d’être féconde.

Car ce n’était pas avec les Turcs qu’il était possible de réveiller le fanatisme religieux dans toutes les couches de l’islamisme.

C’était avec les Arabes.

Il savait combien est profonde, malgré la communauté de religion, la division entre les uns et les autres.

Ce n’était pas non plus le sultan de Constantinople qui pouvait se mettre à la tête du mouvement panislamique ; le sultan qui l’avait précédé, Ahd-ul-Hamid, s’y était essayé avec une ténacité rare et n’avait réussi qu’à perdre plusieurs provinces en Europe sans s’imposer aux musulmans d’Afrique.

Celui qui seul pouvait réunir toutes ces forces désunies, c’était le plus haut dignitaire de la religion de Mahomet : le « khalife » de la Mecque.

Et ce titre de khalife qu’il possédait par droit de naissance, étant du sang d’Albas, oncle du Prophète, il ne l’avait révélé au monde musulman qu’en quittant le pouvoir turc.

Allah avait eu ses desseins ! Il n’avait qu’a s’incliner devant sa puissante volonté.