Page:Driant - L’invasion noire 1-Mobilisation africaine,1913.djvu/93

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— C’est vous, Zahner ?

— Oui, moi, et rudement content de vous retrouver ! Heureusement que Baba vous avait vu vous diriger par là.

— Eh bien ! m’expliquerez-vous ?

— Ah ! mon capitaine, vous expliquer !… filons d’abord : voici Hilarion, votre ordonnance, qui vous apporte votre burnous et votre chéchia : j’ai déjà revêtu le mien, car après tout ce que je viens de voir…

— Eh bien ?

— Il ne ferait plus bon pour nous d’être pincés en uniforme dans ce maudit Sahara.

— Ah ! mon capitaine, mon capitaine, en voilà une d’histoire ! dit Hilarion, en jetant sur les épaules de son chef l’épais vêtement de laine blanche que tous les officiers d’Afrique portent dans le Sud pour se garer du rayonnement nocturne.

Et pendant que le lieutenant, prenant le bras du capitaine de Melval, l’entraînait suivi des deux ordonnances et de la jeune fille, voici ce que, à bâtons rompus, apprit l’officier :

Vers deux heures du matin, un grand feu avait été aperçu dans la direction de l’Ouest où, quelques jours auparavant, avait été vu un fort parti de Maures nomades.

C’était certainement un signal attendu, car, à peine avait-il paru, qu’on avait entendu la voix aiguë du marabout criant au milieu du chantier.

En un instant, tous les tirailleurs étaient sortis des « guétoun », habillés et armés ; l’adjudant et le sergent-major, seuls gradés français de la compagnie, avaient été tués au sortir de leur tente par des nègres employés au chantier. Le sous-lieutenant avait dû avoir le même sort.

Zahner qui, heureusement, ne dormait pas et était sorti de sa tente au premier bruit, s’était élancé vers la tente du capitaine et n’y avait trouvé qu’Hilarion, accouru dans le même but ; alors tous deux avaient traversé le camp par la face qui regardait Tambouctou ; près des faisceaux ils avaient rencontré Baba, qui avait vu le capitaine de Melval et la jeune fille s’éloigner dans la direction de la ville, et qui, après un instant d’hésitation, s’était joint à eux,

Zahner n’en savait pas davantage et ce qui venait d’arriver