à croire pratiquement que le murmure du vent et le papotement politique de tel ou tel étaient le même souffle et une rébellion montait en lui.
Tandis qu’il regardait le nouveau venu, une affreuse pitié lui tordit le cœur. Le garçon, qui s’appelait Cormont, Jacques Cormont, était très jeune. Il apparaissait comme une victime de la cruelle faiblesse du monde français et non comme un de ses agents, ce qu’il croyait pourtant être déjà. Les mots du jargon politique devenaient dans son sang comme des virus tout neufs et y rencontraient la fièvre. Il en était défiguré une seconde fois, l’ayant été déjà par le combat de 40. Son visage avait été brûlé et le ferme profil était enveloppé par le tissu cicatriciel comme par un vieux chiffon hideux. Mais le profil protestait contre la gifle sournoise ; dans le cuir bouilli, les yeux jetaient une flamme ardente et pitoyable. Constant aurait voulu se boucher les oreilles pour ne pas entendre les mots de billon qui allaient sortir de cette bouche touchée par le feu ; il constata avec soulagement que Cormont était assez sobre.
Cormont traitait avec la considération hargneuse qui va de soi ses aînés et il n’aurait même pas regardé Constant, s’il n’avait pas senti que l’autre avait une sorte d’expérience intime de la vie qui lui manquait à lui, jeune intellectuel jeté dans les combats les plus superficiels. À l’égard de Salis et Préault, il marquait la même timide mais obstinée rébellion qu’à l’égard de Bardy. À la manière de la jeunesse, il mélangeait la honte et la fierté et il en composait un incompréhensible