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— Ou d’un faux pas.

Alain s’arrêta de marcher et regarda, avec un mépris triste, Dubourg, Dubourg qui était gentil et sot.

— Mais, grand nigaud, dit-il doucement, tu sais bien qui je suis.

Dubourg resta bouche bée.

— C’est vrai.

— Et tu m’aimes comme je suis, et pas autrement.

— Mais qu’est-ce que serait mon amitié si tu ne la sentais pas comme quelque chose qui veut te modifier ou t’altérer ?

Une exclamation vint aux lèvres d’Alain ; il la retint un peu, puis la laissa aller.

— Je voudrais que tu m’aides à mourir.

— Ah non ! Alain, j’aime la vie, j’aime la vie. Ce que j’aime en toi, c’est la vie qui y est. Comment veux-tu ?…

— Oui, tu as raison… Ah ! si j’avais pu me confier à toi.

— Ah oui !

— Au fond, je ne peux pas, tu le sais bien.

— Tu crois ?

Dubourg était humilié. Il savait bien que pour sauver Alain, il aurait fallu se dévouer à lui, lui donner plusieurs mois de sa vie, oublier un peu les dieux d’Égypte, pour s’inspirer d’eux réellement.

L’instant d’après, il se déroba dans la colère. Quelle faiblesse ! Quelle absence de virilité chez