Page:Drouot – Eurydice deux fois perdue, 1921.djvu/65

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Je ne te vois pas, je ne t’imagine pas, je t’aime. Ma tristesse vient de tant de force, de tant d’ardeurs, de ce crépuscule-ci, perdus pour notre amour, de tous ces jours enfin que ne m’aura point comptés ta voix aux douceurs affligeantes.

* * *

Tout ce qui m’étonne prend, du même coup, ton nom ; tout sentiment vif qu’éveille en moi la surprise, c’est toi-même : un oiseau part sous ma main ; un papillon s’ouvre dans l’air ; un rayon de soleil m’illumine — et je te salue du bout des lèvres !

Quand j’ai longtemps marché dans les terres, la fatigue aidant, je t’oublie ; je songe à la gloire, à la beauté d’un vers, à celle de l’océan. Qu’une chaumière tout à coup, qu’une ferme perdue s’enlève sur le ciel, mais c’est toi qui l’habites ; je retiens une brusque larme, j’étouffe un cri.

Je me couche dans le blé noir. Cette