Page:Drumont - La France Juive édition populaire, Palmé 1885.djvu/217

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traditions, de sentiments élevés, pour aller en voiture vers un autre salon, où il retrouvait la même atmosphère ; il n’était jamais sorti d’un monde où l’on parle et où l’on pense noblement, où les faiblesses mêmes se voilent d’apparences idéalistes, où les passions sont rarement basses. En regardant en lui-même, il n’apercevait rien qui fût une dégradation de l’homme ; il se voyait jeune, travaillant comme s’il avait sa carrière à faire ; obstinément fidèle, dans son optimisme généreux, à certaines idées libérales ; ayant de l’orgueil, sans doute, mais le bel orgueil des lettres, la louable ambition de rendre des services à son pays.

Évidemment, cet ancien Président du Conseil aura été mêlé activement au mouvement d’un siècle où le Juif a tout conduit et conduit tout, sans avoir vu le Juif, sans deviner son rôle une minute, sans soupçonner ce que peut contenir de haine contre la vieille société française, contre l’aristocratie, contre le Christ, le cœur d’un Juif allemand, dont les pères ont été pendus entre deux chiens.

Si le Juif lui est apparu, ce n’est guère que sous la forme d’un baron déjà débarbouillé, fort honoré d’être en pareille compagnie et s’y tenant à peu près convenablement ; il ne s’est pas douté que celui qui venait de l’appeler obséquieusement « mon cher duc », soudoyait les insulteurs qui allaient criant par les rues : « Demandez la banqueroute de l’Union générale, le suicide de M. Bontoux, l’arrestation du prince Victor de Broglie ! »

Avec moins d’éloquence et de mérite, la plupart des membres de la droite vivaient comme le duc de Broglie, dans la sphère irréelle. Je gage que le comte Othenin d’Haussonville, par exemple, ne savait pas, quand il était député, le quart de ce qu’il a appris en