Une difficulté se présenta encore au dernier moment. Calmer avait fait au nom de sa femme l’acquisition, d’un terrain à la Villette ; en voyant que ses coreligionnaires, allaient prendre ce terrain, la femme de Calmer écrivit à M. de Vergennes, ministre des affaires étrangères, pour empêcher cette acquisition et forcer les Juifs à prendre le terrain de la Villette.
Enfin, tous les obstacles furent levés et le 31 mai 1785, Lenoir autorisa M. Cerfbeer à disposer en faveur des Juifs du terrain qu’il avait acheté au petit Montrouge. Ce terrain servait encore en 1804, il a été remplacé par un terrain au Père-Lachaise accordé par la Ville et comme ce second terrain n’a pas tardé à être insuffisant, la Ville en a accordé un autre à Montmartre. Quand les chrétiens gêneront les
fermés en 1821, au moment de la construction de la synagogue de la rue de
la Victoire.
Le premier restaurateur israélite s’appelait Bertoan, il donna
l’hospitalité en 1784 au grand rabbin d’Amsterdam, Saül, qui passait par
Paris pour se rendre à Jérusalem, afin de finir ses jours dans la ville sainte.
M. Albert Cohn, auquel nous empruntons quelques-uns de ces détails, nous
apprend qu’on recourut aux connaissances talmudiques du voyageur pour
l’établissement d’un bain religieux qui n’existait pas encore. À cette époque
on en organisa un sur un bateau de blanchisseuses près le Pont-neuf, qui
resta à la même place pendant trente-huit ans.
On ouvrit, à peu près vers le même temps, deux petites écoles de
garçons, dans lesquelles on apprenait à lire l’hébreu. L’une était dirigée par j.
Cahen, l’autre par M. Aron, polonais, dont le descendant, qui avait été mon
condisciple, devint directeur du Journal Officiel, parce qu’il était Juif, et,
sous prétexte que j’étais chrétien, trouva moyen de m’enlever une petite
situation que j’occupais dans ce journal.
Pendant la Terreur ces deux maîtres conduisaient chaque Décade leurs
élèves à Notre-dame, devenue le temple de la Raison, pour voir la fille
d’opéra qui dansait sur le Maître autel.