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le juif

jours un point presque imperceptible qu’il ne faut pas franchir avec l’Aryen.

L’Aryen est un géant bon enfant. Il est heureux pourvu qu’on lui conte une de ces légendes dont a besoin son imagination éprise du merveilleux. Ce qui lui plaît ce ne sont pas des aventures dans le genre des sémitiques Mille et une Nuits, où des enchanteurs découvrent des trésors, où des pêcheurs, jetant leurs filets dans la mer, les retirent pleins de diamants. Il est nécessaire, pour qu’il soit touché, que sur la trame de toutes ces fictions se détache un être qui se dévoue, qui combatte pour une cause, qui se sacrifie, qui aille comme Parsifal à travers mille dangers à la conquête du Saint-Graal : la coupe remplie du sang d’un dieu.

L’Aryen est resté l’être candide qui se pâmait au moyen âge en écoutant les chansons de geste, les aventures de Garain le Loherain, d’Olivier de Béthune ou de Gilbert de Roussillon qui, après avoir refusé d’épouser la fille d’un sultan, transperçait cinq mille mécréants d’un seul coup de lance. Il a écouté longtemps la légende de 89 comme il eût écouté le récit d’un cycle chevaleresque. Un peu plus et les rédacteurs de la République française lui auraient fait croire que les membres du gouvernement de la Défense nationale, montés sur des chevaux fougueux, comme les anciens preux, avaient bravé les plus affreux périls pour gagner la bataille de l’emprunt Morgan. Pendant qu’il est naïvement intéressé par ces prouesses, rien n’est plus facile que de lui enlever sa bourse et même de lui enlever ses bottes sous prétexte qu’elles le gêneraient pour marcher dans la voie du progrès.

À l’Aryen, je le répète, on peut tout faire ; seulement il faut éviter de l’agacer. Il se laissera dérober tout ce qu’il pos-