Page:Drumont - La France juive, tome premier, 3eme édition, 1886.djvu/437

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impunités accordées aux gens dont on a peur, aux gens qui de près ou de loin touchent encore à la bourgeoisie, il faut opposer, pour achever la peinture de l’état d’âme des républicaine de 1871, le plus effroyable mépris de la vie humaine qu’on ait jamais vu à aucune époque.

Dans l’histoire, je cherche avant tout non le détail à scandale, mais le détail à symptôme, non le renseignement à sensation, mais le renseignement à réflexion. J’estime que des faits minuscules sont aussi intéressants pour l’étude d’une époque que des faits importants. Dans les grands faits effectivement, les batailles, les événements extraordinaires, c’est Dieu qui se révèle, dans les petits faits, c’est l’homme qui se trahit. Je regarde, par exemple, comme un excellent document cette conversation que le baron Olivier de Watteville, alors inspecteur général des prisons, eut avec Calmon, alors sous-secrétaire d’État au ministère de l’intérieur, et qu’il m’a autorisé à reproduire

M. de Watteville voulait maintenir l’arrestation d’un M. B. de M. que le gouvernement décora plus tard.

— C’est un de nos agents, laissez-le libre.

— Mais, Monsieur le sous-secrétaire d’État, il a fait fusiller quatorze gardes nationaux réfractaires à la Commune.

— C’était pour mieux cacher son jeu…

— C’est bien consolant, Monsieur le sous-secrétaire d’État, pour les familles des victimes.

Qui a prononcé ce mot affreux ? Est-ce un Sylla pour lequel la raison d’État justifie tout ? Un soldat habitué à risquer sa vie et pour lequel la vie des autres n’a pas plus de prix que la sienne ? Non, c’est un bureaucrate, un centre gauche, un libéral, un représentant des idées modernes, un membre de l’académie des Sciences morales et poli-