Page:Drumont - La France juive, tome second, 3eme édition, 1886.djvu/109

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à un notaire de l’Aude et 125,000 francs à Melun. Les 750,000 francs ne sont pas restitués à temps. Un procès, dont la presse rend compte, s’engage et l’on met aux enchères les Vives-eaux, leur splendide mobilier, la cave qui contient des vins de grands crûs, Moët, Cliquot, Château-Yquem, Chambertin, Saint-Emilion, les écuries avec douze chevaux de luxe, attelage à la Daumont, ducs, breacks, coupés, landaus, calèches. Au mois d’août 1884, au moment où M. Eugène Delize, huissier à Melun, va procéder à la vente, une dépêche de l’Aude arrive qui ordonne de surseoir.

N’est-ce point là un beau rêve pour cette famille de professeur qui n’a eu longtemps pour vivre que les maigres appointements du père ?

Ce qui confond l’imagination dans l’affaire de l’Union, c’est l’attitude des victimes elles-mêmes.

On venait d’enlever à la noblesse française ce qui, pour elle, était jadis plus précieux que l’argent, plus précieux que la vie : l’honneur. Ce cher trésor, amassé pendant tant de générations, était jeté au ruisseau. Les plus beaux noms, les Broglie, les d’Harcourt, les Biencourt, les Lupé étaient couverts de boue, assimilés à ceux des aigrefins véreux qui défrayent la chronique des tribunaux.

Ce qu’on appelle le monde manifesta l’intention de ne plus revoir au moins ces étrangers qui, pour augmenter leur monstrueuse fortune, n’avaient pas hésité à déshonorer la vieille France. Pendant huit jours on tint parole. Les baronnes épouvantées d’être mises ainsi en quarantaine, chassées de ce paradis où elles étalaient leur luxe insolent, se lamentaient et reprochaient à leurs maris d’avoir fait le coup. Pour tâter le terrain, elles essayèrent de donner une petite fête. C’est une grande qu’il eût fallu donner. On s’étouffait dans les salons à ce bal des victimes, et, au