Page:Drumont - La France juive, tome second, 3eme édition, 1886.djvu/175

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Elles n’ont même pas la pensée de faire profiter des chrétiennes de l’argent qu’elles dépensent. Un groupe de femmes dont le nom, en dehors des cocodettes bruyantes, a une influence mondaine, honnête et méritée, aurait pu réunir en un atelier ces jeunes filles laborieuses pour lesquelles la vie est si rude, les former en association, leur commander des vêtements simples. L’élan est si vite donné à Paris que, le lendemain, la mode aurait été de porter des toilettes modestes et de se fournir à cette association féminine.

Loin de concevoir un tel projet, les femmes du monde se regardent comme les obligées des faiseuses célèbres qui consentent à les habiller. La fête de la couturière est un événement, ses clientes lui envoient des cartes, des bouquets, des cadeaux ; la maison est encombrée des le matin. Il y a là un tableau de genre tout fait, que la plume d’un essayiste parisien nous retracera peut-être quelque jour.

Comme tous ceux qui sont possédés d’une folie, les femmes supportent tout à la condition que cette folie soit satisfaite, elles sont à la merci de leurs fournisseurs ; c’est l’histoire des filles qui vont pleurer à la porte de ceux qui les battent. On n’a pas l’idée de la façon dont les meilleures clientes sont traitées à la moindre réclamation. Worth, enrichi par les prodigalités de tant de malheureuses éperdues de vanité, fit imprimer une liste où les plus beaux noms de France étaient marqués de la lettre A, qui signifiait escrocs, ou les autres étaient désignés par la lettre B, indiquant l’abus de confiance probable à la suite de dépenses au-dessus des ressources. La liste, mise entre les mains de toutes les ouvrières, traîna bientôt dans toutes les antichambres, on en colporta des exemplaires dans tous les