Page:Drumont - La France juive, tome second, 3eme édition, 1886.djvu/192

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Ce fut la première manière de Meyer. Il avança vite grâce à la grande poussée juive qui se fit après la guerre. Aujourd’hui il a maquignonné, boursicoté, trafiqué, il a un coupé, un hôtel, un journal. Il n’excite ni l’envie ni même le mépris, mais plutôt comme un incommensurable étonnement. Ayant remarqué que quelques gens du monde affectaient une certaine roideur, d’assez mauvais goût du reste, il les a imités, mais imités en charge ; il ne remue plus, il ne tourne plus la tête ; avec son teint blême, son crâne d’ivoire, sa barbe luisante, il donne l’impression d’une momie sémitique déambulant en plein Paris à l’aide d’un ressort qu’on ne voit pas.

Cet être fantastique, ce faquin d’une si invraisemblable faquinerie stupéfie littéralement par des plaisanteries faites de sang-froid qui renversent les gens. Au moment des obsèques de l’Empereur à Chislehurst il voulait marcher aux côtés de la famille impériale ; il a pris le deuil du comte de Chambord et annoncé gravement qu’il ne pourrait assister à la fête d’Ischia à cause de la mort du Roi. Tout cela, je le répète, se produit sérieusement, silencieusement, sans rire.

Il a vraiment une sorte de rôle dans la vie élégante ; c’est lui qui a mis en circulation ces mots de « pschutt » et de « v’lan > que nos gentilshommes répètent avec une grimace idiote. À l’exposition canine, les piqueurs de la duchesse d’Uzès sonnent les honneurs quand il arrive[1], ce qui se comprendrait tout au plus dans une exposition de pisciculture. Ce Tom Lewis, frotté de lettres, est mêlé à tout, il sert d’arbitre, il remplit l’office d’ambassadeur, il fait les courses. C’est lui qui intervient dans le procès de Sarah Bernhardt et du Juif Koning, c’est lui qui va prendre

  1. Gaulois, 31 mai 1884.