Page:Drumont - La France juive, tome second, 3eme édition, 1886.djvu/20

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plaider en Algérie et il avait été témoin de rixes survenues entre Musulmans et Israélites à propos des fêtes religieuses. En profitant d’un pareil moment pour rendre le décret qui naturalisait les Juifs algériens, il trahissait donc purement et simplement la France pour servir les intérêts de sa race.

En 1871, cette mesure avait un caractère particulièrement odieux. Les Arabes avaient fait héroïquement leur devoir pendant la guerre. Ces « diables noirs, » comme les appelaient les Prussiens, qui bondissaient sous la mitraille, avaient émerveillé l’ennemi à Wissembourg et à Woerth. Albert Duruy, qui, pour aller de suite au feu, s’était engagé parmi ces tirailleurs algériens, m’a raconté maintes fois l’effet presque fantastique qu’ils produisaient avec leurs cris sauvages, leur joie en entendant parler la poudre, leur façon de se ruer en avant comme des tigres. Pour ce camarade, qu’ils nommaient « le fils du vizir, » ces farouches avaient à la fois du respect et de l’affection. Quand, à Wissembourg, les tirailleurs dispersés, genou à terre, dans les houblonnières, reçurent l’ordre de tenir jusqu’au dernier moment pour protéger la retraite, Duruy baissa involontairement la tête sous la grêle de balles. Tout à coup, il sent une main de fer qui s’abat sur son épaule. « As pas pour ! as pas pour ! lui crie un Turco en montrant, comme pour rire au danger, ses dents blanches qui brillaient sur son visage cuivré.

On ne se fût étonné qu’à demi si le gouvernement de la Défense nationale eût accordé quelque récompense éclatante à ces Arabes héroïques qui, après avoir lutté si longtemps contre nous, nous défendaient à l’heure du péril[1].

  1. Le général Bosquet avait été un des premiers à prévoir les services que pourraient rendre les troupes indigènes. Dans une lettre, écrite le 30 janvier 1856, au général Randon, alors gouverneur