Page:Drumont - La France juive, tome second, 3eme édition, 1886.djvu/300

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Aujourd’hui le commerce des liquides appartient à quelques gros commanditaires, plus banquiers que marchands de vin, qui tiennent entre leurs mains, dans un vasselage absolu, les établissements de second ordre. Le marchand au détail n’est guère qu’un employé, un prête-nom  ; il gère ce qu’on appelle une régie ; il ne peut s’adresser ailleurs quand on le sert mal, car, d’ordinaire, le loyer est payé directement par les fournisseurs du magasin. Un débit peut avoir cinq ou six patrons successifs, vous y trouverez toujours les mêmes liquides pris chez les mêmes industriels.

Le commerce des vins est donc devenu un commerce de produits chimiques où l’on expérimente toutes les inventions, où l’on pratique la gallisation, la pétiotisation, l’alunage, le salage, le sucrage, le plâtrage, où l’on combine les matières colorantes de toute espèce, les ingrédients de toute nature.

On devine quelle influence désastreuse cette chimie exerce sur la santé publique. Les vins naturels, en effet ont des principes d’assimilation et les excès mêmes avec eux n’ont que de médiocres inconvénients[1]. Vous avez vu en Bourgogne, par exemple, des vignerons dont la trogne est rubiconde, dont la face a pris les couleurs du pampre à l’automne ; ils sont toujours gais, bien portants, vivent très vieux. Les breuvages composés avec des essences, au contraire, ne s’assimilent pas, ils ont l’action de véritables poisons, ils déterminent des crises de delirium tremens, des accès de frénésie, des raffinements de férocité dont l’homme est à peine responsable.

  1. Voir à ce sujet l’excellent rapport du docteur Lancereau sur l’alcoolisme, lu à l’Académie de médecine, à la séance du 17 novembre 1885.