couchèrent dans leurs cahutes et y attendirent la mort. Le père Laplace qui n’avait pas mangé depuis quarante heures, ce qui, quoiqu’en puisse penser Poubelle, est dur pour un vieillard de 74 ans, s’éteignit comme une bougie sur laquelle on souffle, à une réunion de la salle Graffard[1]. Le père Gouri, chassé de son taudis de la cité des Bleuets, vendit ses loques pour payer ses dettes et alla se pendre dans un garni du boulevard de Belleville. Une vieille femme écrivit à un journal radical pour demander à Poubelle « de la faire abattre. »
Cette haine du pauvre, du travailleur, qui est sans exemple dans l’histoire, prend toutes les formes. Les républicains au pouvoir semblent n’avoir qu’une préoccupation : rabattre le prolétaire sur le Juif pour que celui-ci en fasse sa proie plus aisément. Tout est bon au Juif, en effet ; en dépouillant la France en grand par les emprunts et les sociétés financières, il n’a point abandonné l’usure sordide
- ↑ L’enterrement du vieil amant des ombres, victime de la rapacité des
républicains, eut un caractère particulièrement touchant. Un chiffonnier poète, M.
More, lut sur la tombe une pièce de vers naturellement incorrecte, mais dont
certains passages étaient émouvants. Voici quelques-uns de ces vers, à titre de
curiosité :
Cet homme s’est éteint au milieu de vos peines ;
Pendant que rassemblés, honnêtes travailleurs,
Vous cherchiez à tarir la source de vos pleurs,
Le sang s’est glacé dans ses veines.
Ce fut un vieux lutteur ; comme vous, il vécut
Sous le ciel noir, au sein des nuits froides et sombres ;
Comme vous tous, il fut un vieil amant des ombres
Que le labeur, hélas ! vaincut (?)
Salut à ce vieillard qui tombe haut la tête !
Sa mort jette en vos cœurs un lugubre frisson.
Puisse-t-elle arrêter l’effroyable tempête
Qui monte au ciel à l’horizon !