Page:Drumont - La France juive, tome second, 3eme édition, 1886.djvu/319

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est un mauvais tour que nous a joué le grand Inconscient.

Encore une fois, nous n’avons ni à juger les cœurs, ni à sonder les reins. Remueurs de paroles, constructeurs de systèmes, génies perdus par l’ironie ou obscurcis par l’orgueil, libres-penseurs de toutes les nuances n’ont rien à voir avec les misérables qui jettent un vieillard hors de son domicile parce qu’il ne pense pas comme eux, ou qui volent le pain d’un prêtre indigent. Littré, même avant sa conversion, Vacherot, ont protesté avec dégoût contre ces infamies ; demandez à Jules Soury comment il juge des hommes comme les Constans et les Cazot, et vous verrez ce qu’il vous répondra.

En réalité, la lutte contre les croyances de la majorité des Français a été, non une revendication de la libre-pensée, mais la persécution de trois religions voulant en opprimer une autre. Si les Juifs, confondus avec les Francs-Maçons, se distinguèrent par une haine spéciale contre Celui qu’ils avaient crucifié, s’ils furent à la tête du mouvement, si, grâce à leurs journaux, ils répandirent à profusion les calomnies les plus ignobles, ils furent puissamment aidés par les Protestants qui, eux aussi, par un illogisme singulier, en voulaient au Christ parce qu’ils se sentaient coupables envers lui.

M. Eugène Lamy, qui est, je crois, l’auteur d’une brochure fort remarquable et fort remarquée, la République en 1883, a parfaitement discerné ce qu’a de particulier la persécution franc-maçonnique.

On reconnut bientôt, écrit-il, que la Franc-Maçonnerie est un ordre religieux en révolte, quand se déroula cette vengeance où dipparut à la fois la cruauté des luttes confessionnelles, le calme implacable des haines sacerdotales et la corruption de l’esprit monastique tournée en science de persécution.