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Page:Drumont - La France juive, tome second, 3eme édition, 1886.djvu/437

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Elle sait qu’elle ment, que lui importe ! C’est avec ces mensonges qu’on fait tomber les têtes. La bonne nature tient à jouir jusqu’au bout de l’agonie de sa victime ; la hyène veut du moins sentir le sang puisqu’elle ne peut pas le boire.

Un matin d’octobre un artiste s’installe, une plume et du papier à la main, à une fenêtre de la rue Saint-Honoré. Une femme est à ses côtés, riant, coquettant, étalant ses grâces terribles ; soudain un éclair de joie passe dans les yeux de cette femme, une rumeur à couru dans la plèbe qui attend sa proie, une charrette apparaît, elle porte à l’échafaud celle qui fut la reine de France. La Furie cependant ne peut dissimuler un mouvement de dépit. Marie-Antoinette est plus majestueuse encore qu’à Versailles. Brisée ce jour-là par une de ces indispositions qui anéantissent les femmes, sous le faix de douleurs qui semblent au-dessus du courage humain, l’infortunée trouve encore la force d’être calme jusqu’à l’heure, heureusement proche, où, touchant au terme de sa longue agonie, elle criera au bourreau : « dépêchez-vous ! »

L’artiste était David[1], la femme était Mme Jullien.

Le père, terrorisé par cette gracieuse compagne, vota la mort de Louis XVI en assurant qu’il avait toujours haï le roi et que « son humanité éclairée ayant écouté la voix de la justice lui ordonnait de prononcer la mort. »

Le fils chassait de race. Qu’on se figure Gilles ou Aba-

  1. Ce dessin fait partie de la collection Hennin à la Bibliothèque nationale. Au-dessus on lit cette note de la main de M. Hennin : « Portrait de Marie-Antoinette, reine de France, conduite au supplice, dessiné à la plume par David, spectateur du convoi et placé à une fenêtre avec la citoyenne Jullien, femme du représentant Juillien. Copié sur l’original existant dans la collection Soulavie. »