Page:Drumont - La France juive, tome second, 3eme édition, 1886.djvu/482

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ception du juste et de l’injuste qu’elle est incapable de se rendre compte de tout ceci ; pour elle tout se réduit à des jeux scéniques : elle applaudit quand c’est bien joué et c’est tout.

Supérieurs à tout, les républicains peuvent tout oser. Si une chrétienne exaspérée par les persécutions s’était permis de recourir au revolver, les journaux amis de M. Hugues l’auraient dénoncée avec ensemble et la loi aurait épuisé ses rigueurs sur elle. Vous avez vu, au contraire, l’attitude du juge Athalin devant Mme Hugues, soudain transformée de déesse de la Liberté en furibonde Euménide ; il l’accable de politesses, il embrasse le bas de sa robe en lui demandant sa protection ; il refuse de confronter l’accusée avec le cadavre de sa victime, ce qui est une formalité obligatoire, et cela sous prétexte d’épargner une émotion à une femme qui peut avoir toutes les qualités, mais qui ne ressemble certainement pas à une sensitive, s’il faut en juger par le sang-froid avec lequel elle a ajusté son ennemi.

Nous sommes ici, d’ailleurs, dans la pure tradition jacobine. La mort seule semble capable d’expier la plus légère offense contre l’auguste personne du Jacobin ou de la Jacobine. Léonard Bourdon, le crapuleux proconsul dont Taine nous a raconté les exploits, est insulté un soir à Orléans en sortant d’un mauvais lieu et reçoit quelques horions dans une rixe entre ivrognes. Savez-vous combien d’êtres humains furent immolés pour ce fait ? Neuf. Un de ces malheureux avait dix-neuf enfants dont quatre servaient aux armées[1]. Les parents de ces infortunés vinrent supplier,

  1. Wallon, Histoire du Tribunal révolutionnaire.