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Page:Drumont - La France juive, tome second, 3eme édition, 1886.djvu/521

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Ces faits monstrueux sont dans toutes les mémoires. La discussion à la Chambre de l’interpellation de l’extrême gauche sur les affaires de Corse jeta sur nos mœurs publiques une aveuglante lumière. Assassinat par des bravi payés par le préfet[1], fraudes électorales, corruptions de tout genre, secours distribués pour la perte d’un bétail qui n’avait jamais existé, tout était là. M. de Douville-Maillefeu, en voyant monter vers le gouvernement cette marée de boue, semble avoir éprouvé cette admiration qu’on éprouve devant certains déchaînements de la mer et cria avec une sorte de transport : « Qu’on dise tout ! que la honte coule à pleins bords ! »

La Chambre n’eut même pas un blâme platonique pour les Trémontels et les Bissaud et vota l’ordre du jour pur et simple.

Rien ne fut singulier comme l’attitude de Brisson l’incorruptible. Toutes les fois qu’on essaye de dénoncer à la tribune quelques-unes de ces prévarications de ministres ou d’hommes publics qui sont évidentes sans qu’on puisse les prouver matériellement, il s’écrie : « Donnez des preuves ! » Cette fois il existait un témoignage irrécusable des concus-

  1. On n’a point l’idée, me disait M. de Multedo, conseiller général, de ce que l’opportunisme a fait de la Corse en quelques années. On y est revenu à l’état sauvage et la loi n’existe plus pour ceux qui n’appartiennent pas à la bande dominante. Le 25 janvier 1885, un ouvrier, Dominique Antoine Urbain, est frappé de cinq coups de couteau dans la région du cœur. Celui qui l’a frappé, un nommé Franchini, qui a déjà joué un rôle dans l’affaire Saint-Elme, est acquitté par le tribunal d’Ajaccio, et c’est la victime qui est condamnée aux dépens. Chacun se fait justice soi-même ; le nombre des meurtriers réfugiés dans les maquis, qui était descendu à 60 à la fin de l’Empire, est maintenant de plus de 1,200.