Page:Drumont - La France juive, tome second, 3eme édition, 1886.djvu/546

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Il a travaillé pour enrichir les Juifs, il a été empoisonné par les marchands de vin juifs, chers à Lockroy, il est à bout. Jadis, ce déshérité trouvait près de son chevet un être de bonté, mère, sœur et femme à la fois qui lui montrait un peu de ciel bleu.

La Sœur n’avait pas besoin de parler beaucoup pour affirmer qu’il y avait au delà de ce monde cruel et misérable un monde où tout était justice et lumière ; sa présence près de ce lit proclamait assez haut les promesses éternelles. Charmante, intelligente, riche souvent, elle avait tout sacrifié et elle était là dans cette atmosphère empestée, attentive aux souffrances de tous, soignant avec un dévouement souriant des plaies parfois dégoûtantes, préférant à tout ce titre de servante des pauvres, c’est-à-dire des enfants de Dieu.

Désormais, le malheureux n’a plus même le droit d’espérer dans une patrie céleste. Chien malencontreux qui, de sa vie, n’a jamais trouvé un bon os, il sera enfoui comme les bètes, perinde ac jumenta.

Cette persécution du moribond, cette laïcisation, contre laquelle ont protesté 76 médecins sur 80, est peut-être le crime des crimes parmi tant d’actes abominables. Si quelque savant eût découvert un breuvage consolateur, ne se hâterait-on pas d’acheter les précieuses fioles qui contiendraient de l’espérance et de l’oubli ? Quelle scélératesse ne faut-il pas pour arracher à ces infortunés qui, pendant de longues heures, repassent mélancoliquement les phases douloureuses de leur pénible existence, ce sentiment religieux qui est le meilleur et le plus doux de tous les baumes ?

Dans de telles conditions, l’hôpital, ce séjour déjà lugubre devant lequel on ne passe qu’en tremblant, est devenu un