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Page:Drumont - La France juive, tome second, 3eme édition, 1886.djvu/94

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avec une pointe de raillerie ; il dit, par exemple, à de grands seigneurs qui viennent quêter chez lui pour des blessés carlistes : « Je veux bien vous donner quelques billets de mille francs, mais êtes-vous bien sûrs que cet argent ira aux carlistes ? »

Cette différence d’allures avec les Rothschild s’explique facilement. Les Rothschild ont hérité d’une situation sociale déjà créée par leurs parents, qui ont essuyé les premières rebuffades ; ils croient, jusqu’à un certain point, appartenir à l’aristocratie ; Hirsch, au contraire, croit que l’aristocratie lui appartient.

Cette place dans le monde élégant, qui lui faisait tant envie, Hirsch, en effet, l’a conquise petit à petit, par lui-même ; il sait le tarif de chaque scrupule et le prix marchand de chaque conscience. Avec Bismarck et Gambetta, c’est un des trois grands mépriseurs d’hommes de l’époque, mais le mépris chez lui n’est tempéré par rien. Si Bismarck a pu apprécier toute la lâcheté humaine dans les diplomates et les politiques à genoux devant sa fortune, il ne peut méconnaître les beaux côtés de l’humanité quand il songe à tant d’obscurs héros qui se sont sacrifiés pour la gloire de l’Allemagne. S’il avait dans son entourage les plus effrayants échantillons de la servilité, Gambetta pouvait se rappeler, qu’au commencement de sa carrière, beaucoup d’êtres désintéressés et naïfs l’avaient soutenu en croyant aider au triomphe d’un principe. Hirsch n’a jamais vu dans sa vie un être humain qui se soit adressé à lui autrement que pour lui demander de l’argent.

Il a grandi à mesure que la France s’abaissait. Il y a quelques années à peine, les déclassés du monde eux-mêmes refusaient ses invitations, aujourd’hui les plus qualifiés sont heureux de monter le fameux escalier. Cet esca-