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LXXXVIII
Si longue foy peult meriter merci,
J’auray le gaing de ma perte passée,
Si mon destin toute ardeur n’a chassée
Du beau Soleil, dont je suis eclerci.
Amour, qui fut longuement endurci,
Ores piteux à mon ame offensée,
A mis les yeulx au creux de ma pensée,
Cler à luy seul, à tout autre obscurci.
La forest prent sa verde robe neufve,
La terre aussi, qui naguere etoit veufve,
Promet de fruictz une accroissance pleine.
Or cesse donq’ l’hiver de mes douleurs,
Et vous plaisirs, naissez avec’ les fleurs
Au beau Soleil, qui mon printemps rameine.
  
LXXXIX
Zephire soufle, et sa Dame raméne
Les belles fleurs, dont la terre est couverte.
La forest neufve oit sur sa teste verte
Progne gemir, et pleindre Philomene.
Le ciel trompeur, qui le front rasserene,
De ses thesors nous tient la porte ouverte,
Et pour tirer un gaing de nostre perte,
De nouveaux fruictz la Nature a faict pleine.
Tous animaulx, qui cheminent et noüent,
Qui vont glissant, et qui par l’air se joüent,
Sentent le feu, et je suis le feu mesme.
Vous seulement osez faire la guerre
Contre celuy dont la puissance extreme
Domte le ciel, l’air, la mer, et la terre.
  
XC
Toy, qui fis voir la lumiere incongnue
Au chaste f