Page:Du Bellay - La Deffence, et illustration de la langue francoyse.djvu/4

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de riches, & excellens uœuz de iour en iour dediez à l’image de ta grandeur, pendre le ſien humble, & petit : mais toutesfois bien heureux ſ’il rencontre quelque faueur deuant les yeux de ta bonté, ſemblable à celle des Dieux immortelz, qui n’ont moins agreables les pauures preſentz d’un bien riche uouloir, que ces ſuperbes & ambicieuſes offrandes. C’eſt en effect la Deffence et Illuſtration de noſtre Langue Francoyſe. A l’entrepriſe de laquele rien ne m’a induyt, que l’affection naturelle enuers ma Patrie, et à te la dedier, que la grandeur de ton nom. Afin qu’elle ſe cache (comme ſoubz le Bouclier d’Aiax) contre les traictz enuenimez de ceſte antique Ennemye de uertu, ſoubz l’umbre de tes esles. De toy dy-ie, dont l’incomparable Scauoir, Vertu, & conduyte toutes les plus grandes choſes, de ſi long tens de tout le Monde ſont experimentées, que ie ne les ſcauroy’ plus au uif exprimer, que les couurant (ſuyuant la ruſe de ce noble peintre Tymante) ſoubz le uoyle de ſilence. Pour ce, que d’une ſi grande choſe il uault trop myeux (comme de Carthage diſoit T. Liue) ſe taire du tout, que d’en dire peu. Recoy donques auecques ceſte accoutumée Bonté, qui ne te rend moins aymable entre les plus petiz, que ta Vertu, & Auctorité uenerable entre les plus grãds, les premiers fruictz, ou pour myeulx dire les