Page:Du Calvet - Appel à la justice de l'État, 1784.djvu/128

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Mais c’est à son substitut, M. Mabane, que j’adresse ici, avec une indignation plus réfléchie et plus juste, mes plaintes et mes reproches, parce que le gouverneur n’est, en vertu de sa dignité, qu’éminemment juge, c’est-à-dire de titre, et non de jugement effectif, mon seul cas excepté : mais M. Mabane s’assied tous les jours, d’office, sur les tribunaux ; il est coupable de trahison formelle envers la loi, s’il l’administre sans la connaître : en vertu du bill de Québec, c’est donc la jurisprudence française qui préside aux jugements ; elle varie dans les lois de détail, mais surtout pour la nature des procédures judicielles selon les divers parlements de ce royaume ; mais je défie ce juge français en masque, sorti des boutiques chirurgicales d’Édimbourg, de déterrer dans les annales diverses des judicatures françaises, une seule époque d’une cour se saisissant d’une cause commerciale et compliquée, à la réquisition d’une seule partie, fixant les moments de la plaidoirie, prononçant le jugement, ordonnant d’une immédiate exécution, récusant de faire droit à une interjection d’appel de la part de la partie adverse, et à sa réclamation de délai, pour l’instruction de son avocat, enfin consommant tous ces actes judiciels respectifs, dans le cercle bien raccourci de 20 heures. La judicature française châtie les brigands, mais elle ne copie pas leurs brigandages : des atrocités d’une trempe si noire ne sont faites que pour une infortunée colonie où le despotisme, dans son