Aller au contenu

Page:Du Calvet - Appel à la justice de l'État, 1784.djvu/152

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée
[   128   ]


bles ont échappé à leurs entières usurpations ; peut-être seront-ils des fonds suffisants pour faire pleurer, un jour, ces barbares qui se sont fait un jeu si cruel de rire de mes désastres.

Cependant, au plus fort de mes malheurs, l’amitié vint, par ses épanchements affectifs, adoucir la sévérité de mon sort ; M. Levesque soutint constamment le caractère généreux de mon bienfaiteur et de mon patron à Québec et jusques sous les yeux du despotisme, qui, quoiqu’ennemi de ses vertus, n’osa jamais lui faire un crime et le punir de me servir. M. Dumas St-Martin, en liberté de donner enfin l’essor à ses sentiments, devint, par succession de temps, le père de mon fils, qui encore, sous les livrées de l’enfance, délaissé sous la tutelle de domestiques indolents et stupides, étalait sur sa personne le spectacle hideux de la nudité et de l’indigence et portait sur sa face émaciée, l’image peinte de la fin précoce qui le menaçait. M. du Chesnay (nom respectable, que je ne prononce ici qu’avec admiration) me délia sa bourse pour arrêter la vente de mes biens, que la perte de mes procès allait rendre inévitable : il accompagna ce service de ces manières obligeantes, de cette délicatesse prévenante, qui en amplifièrent le mérite au centuple ; il m’obligea avec toute la noblesse d’un gentilhomme qu’il est, et qu’il mérite bien d’être, en venant me mettre la somme dans les mains, jusques dans ma prison même ; il me reste d’un si noble pro-