Page:Du Calvet - Appel à la justice de l'État, 1784.djvu/160

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main, nous analyserons bientôt la nature de cette excommunication civile, qui, de fait, n’est qu’une tyrannie positive, sur laquelle l’Angleterre, en corps, à commencer par le sénat et ses ministères, s’est étrangement aveuglée de théorie, et égarée de pratique.

Vers la fin de 1762, les sauvages de Missillimakinac, lassés de deux années de voisinage avec les Anglais, s’affranchirent à la sauvage de l’incommodité ; c’est-à-dire, qu’ils coupèrent, sans façon, la gorge à toute la garnison, dont le commandant ne sauva sa chevelure et sa vie, que par l’humaine interposition d’un gentilhomme canadien[1], qui lui avait fait plus d’une fois pressentir l’exécution ; car c’est-là le sort que la judicature indienne adjuge, de volée, dans ses tribunaux, aux usures, aux fraudes, aux déprédations, aux brigandages. Une politique instruite et juste dictait, de commencer par extirper les causes, par la suppression d’un tyrannique monopole, avant de courir à la vengeance des effets, par le châtiment : mais en appelant sur le champ à son épée, le général Gage crut devoir au sang versé de ses compatriotes, de faire marcher un gros corps de troupes, à travers trois cents lieues, fermées de rochers, de forêts, de marres, de rapides, de cataractes, de précipices, de coupe-gorges, en un mot, où une poignée de sauvages en embuscade pouvait égorger à plaisir une armée toute entière.

  1. M. de Langlade.